Les Mapuches
Les Mapuches, littéralement « Peuple de la Terre » (en Mapudungún « Mapu » = la terre et « Che » = les gens), s’étendaient autrefois sur toute la région sud du continent. Précipitée par l’arrivée des colons espagnols et les massacres orchestrés sur leurs terres à partir du XVIème siècle, la diminution du territoire Mapuche au fil des années est sans égal. Ce dernier s’établit aujourd’hui en Araucanie sur une région bien plus restreinte, entre le Chili et l’Argentine. Toutefois, leur résistance est légendaire. Tout d’abord en refusant la servitude Inca puis celle des colons espagnols par la suite, ils devinrent le seul peuple d’Amérique à stopper la conquête ibérique et obtenir certaines garanties pour le respect de leurs droits fondamentaux, comme l’atteste le pacte de Quillin (1641).
Véritables protecteurs de la nature, les Mapuches sont liés à la Terre Mère ou « Nuke Mapu » de façon immuable. Autrefois, le « Mapu » était rempli d’arbres millénaires immenses qui protégeaient et nourrissaient ses bienfaiteurs. Mais les différentes exploitations de pins et d’eucalyptus, plus rentables aux yeux de l’entrepreneur chilien, ont causé en l’espace d’un siècle une extermination massive d’arbres ancestraux, détruisant au passage le paysage et la fertilité du Mapu. Dévoreuses d’eau, ses nouvelles plantations forestières ont détruit l’écosystème en asséchant les puits et les rivières, faisant fuir la faune et la flore.
À partir de 1992, l’Etat chilien, par le biais de la « loi indigène », reconnait la dette du Chili à l’égard de la population mapuche ; mais cela ne débouche pas ni sur des mesures concrètes de restitution de terres (pourtant prévue dans le texte de loi), ni sur une reconnaissance officielle de ce peuple.
Culture
La culture mapuche, de tradition agraire, basée sur la transmission orale et sur une religion centrée sur le culte de la terre et des ancêtres, peine à continuer d’exister. La structure polygame des familles mapuches traditionnelles, mais surtout leur conception communautaire de la gestion des terres agricoles sont autant de traditions qui se heurtent à la logique économique des grands propriétaires fonciers.
Spiritualité
La religion mapuche est construite sur l’idée d’une connexion entre monde spirituel et monde tangible. Ses principaux éléments sont : le respect au monde spirituel ; le culte des esprits ou des ancêtres mythiques, appelés pillans et wangulén (Antu, Kuyén, etc.) ; le culte des esprits de la nature, appelés ngen ; et la relation entre peuple mapuche et Ñuke Mapu (« terre mère »).
Que la croyance des Mapuches en un être supérieur et omnipotent ait été antérieure à leur contact avec le christianisme est objet de controverse ; quoi qu’il en soit, à l’heure actuelle, les Mapuches croient en Ngünechen (« seigneur des gens », hispanisé en Guenechén ou Ngenechén) comme dieu équivalent au — ou synonyme du — Dieu chrétien, mais un dieu qui avait réellement, avant l’influence chrétienne, présenté les caractéristiques des antiques esprits individuels et indépendants.
Pour les Mapuches, Ngünechen est à la fois père, mère, frère et sœur ; sont vénérées en outre une « amie du soleil », qui guérit les maladies des hommes, et des divinités stellaires. L’est et le sud sont sacrés pour les Mapuches, car c’est de ces directions que soufflent les vents bénéfiques, de même que leur est sacré le bleu du ciel. Les animaux sacrés sont les chevaux, qui sont principalement destinés à être montés, mais que l’on tue et consomme à l’occasion de grandes festivités.
Le huecuvus est dans la mythologie mapuche un esprit malfaisant envoyé vers les hommes par le dieu Pillán ; pouvant se manifester comme un tourbillon, ou prendre toute autre forme, il est susceptible de causer aux hommes malheurs et adversités, tels que maladies, mauvaises récoltes, intempéries et autres fléaux. Selon la croyance populaire, rien n’est en mesure de prémunir les humains contre un huecuvus.
Aujourd’hui, les Mapuches sont majoritairement de confession catholique (et dans une moindre mesure évangélique), que leur religion soit le produit du syncrétisme ou qu’il résulte d’une conversion directe consécutive à l’emprise chrétienne. Cependant, en pratique, le « christianisme mapuche » apparaît bien plutôt comme un « paganisme pétri d’éléments catholiques », et les rituels classiques et les machis(prêtres et prêtresses traditionnels) continuent d’y occuper une position centrale
Oralité et tradition
La société mapuche est essentiellement constituée d’une culture orale, c’est seulement vers la fin du XXè que l’on voit apparaître l’écriture comme une pratique acquise et intégrée, pour produire des matériaux qui expriment la pensée théorique, l’art, le récit, la réalité, l’être tout simplement. Auparavant et jusqu’à ces moments là, l’oralité était celle qui véhiculait tout savoir, toute connaissance, tout objet de communication. Comme nous le savons, pour qu’il y ait transmission d’une histoire, il faut une langue, aujourd’hui, celle-ci se maintient essentiellement dans les 8è, 9è et 10è régions du Chili (Temuco, Osorno, Puerto Montt, Chiloé), là où se trouve concentré le groupe le plus nombreux de Mapuches, celui qui manifeste un degré majeur de conservation des coutumes, traditions et usage de l’idiome.
Nous savons aujourd’hui que les jeunes, pour accéder au monde des adultes, devaient passer à seize ans une dure épreuve d’éloquence orale devant le chef de tribu. Nombreux sont les chroniqueurs qui font état des dons rhétoriques du peuple mapuche. Dans son Histoire du Chili, notamment, le Père Rosales dit : «les Indiens entraînent leurs enfants depuis le plus jeune âge à l’exercice de la parole, parce qu’ils savent l’importance qu’a celui qui parle bien au sein du groupe, le contraire est exaction, et n’autorise pas à devenir chef, même pour un descendant de cacique ».
Le mot cacique vient du Mexique et a été introduit par les espagnols. Dans le lexique mapuche ce mot est : qülmen, et veut dire « l’orateur », celui qui parle bien. Effectivement, même aujourd’hui, il est indispensable de dominer avec excellence la langue native pour exercer la suprématie dans sa communauté.
Cérémonie et tradition
La culture mapuche connaît une multiplicité de cérémonies et de traditions, dont les plus connues sont le guillatún, le machitún, le llellipun, le machiluwün, le ngeykurewen et la célébration du we tripantu. Deux de celles-ci vont être brièvement décrites ci-après.
Le nguillatun
Le guillatún (ngillatun), le plus important des rituels mapuches, est une cérémonie propitiatoire et d’action de grâce à la divinité. Elle nécessite un lieu spécialement aménagé à cette fin, le ngillatuwe.
Au centre de cet espace est installé un rehue (ou rewe, sorte d’autel constitué d’un tronc d’arbre taillé en dégrés et fiché en terre), autour duquel prennent place les participants. La cérémonie, qui se prolonge sur un minimum de deux journées et sur un maximum de quatre, a pour objet de demander à Guenechén ou à d’autres êtres spirituels de gratifier le peuple de pluies, de récoltes abondantes, d’un accroissement du bétail et d’autres faveurs dans les années à venir, tout en les remerciant pour leurs bienfaits des années passées ; dans le même temps, tout au long du rituel, l’on prend soin de tenir à l’écart les esprits malfaisants.
Le machitun
Le machitún (ou machitun) a pour but la guérison d’une personne malade. Lors de cette cérémonie, les ancêtres sont évoqués, lesquels, dans la croyance mapuche, ont quitté le monde terrestre pour le monde spirituel et possèdent l’art de diagnostiquer les maux et affections. Le rite fait intervenir un (ou une) machi, qui au début de la cérémonie escalade les sept marches du rehue et y dépose des feuilles de cannelier, l’arbre sacré des Mapuches, pour les brûler ensuite. Au son du cultrún, il (ou elle) prie et chante auprès du malade, jusqu’à entrer dans un état de trance (küymin), lui permettant d’entrer en communication avec les esprits et de s’entendre révéler par eux la cause de la maladie du patient, qui selon la croyance mapuche gît dans quelque maléfice ou transgression, ainsi que la marche à suivre pour le guérir, qui consistera généralement à administrer des infusions, spécifiques à chaque mal.
Conflits politiques
Alberto Curamil est l’un des leaders des Mapuches, un peuple autochtone chilien largement engagé dans la lutte écologique. En 2016, il parvient à empêcher la construction de deux projets hydroélectriques sur la rivière Cautín, un cours d’eau sacré dans la tradition mapuche. Mais en août 2018, il est arrêté par la police locale pour sa participation présumée à des activités criminelles. Pour ses avocats, cette arrestation cache en réalité un motif politique.
Le 10 mai 2019, Alberto Curamil reçoit le prestigieux prix Goldman (Le Nobel vert) afin de récompenser sa lutte pour l’écologie. C’est finalement sa fille qui a reçu le prix en son nom. Devant l’assemblée elle a transmis un message de son père :
« La lutte mapuche est une lutte écologique. Depuis sa cellule, mon père apprécie et reconnaît l’importance de ce prix, qui est une incitation pour continuer à croire qu’un autre monde est possible. »
Sources:
-Wikipédia
-Alterlatine
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