porc

Les origines de l’interdiction du porc


Les auteurs grecs anciens, à commencer par Hérodote, ont considérablement influencé notre regard au point que l’on a pu penser que tous les égyptiens ne mangeaient pas de porc. Et par la suite, jeter comme eux un regard d’opprobre sur les mœurs des Égyptiens, des Perses, etc.
C’est pourquoi l’on déduisit avec trop d’aisance que les juifs de l’antiquité et les égyptiens avaient la même interdiction alimentaire.
De l’extérieur, certes, mais lorsque l’on regarde plus attentivement, tout un monde de nuances et de différences apparaît.

Le porc en Egypte

Le porc égyptien a été domestiqué dans le Delta dès la période pré-dynastique . Bien que des traces apparaissent déjà dans les cultures néolithiques, à partir du porc sauvage, une espèce qui s’apprivoise facilement.
Il a le dos couvert de soies dures, hérissées, les pattes fines et le groin très allongé. Cette race semble se situer entre celle du sanglier et celle du porc actuel. Il vivait soit en horde sauvage dans l’environnement humain, soit en troupeaux domestiqués, ou encore en petits groupes type “porc fermier” dans les familles.

Il est peu représenté sur les parois des chapelles, sauf dans quelques tombes à Beni Hassan, à Elkab et à Thèbes. Il est totalement absent des vestiges des repas funéraires qui s’y déroulaient.
Il est néanmoins considéré comme animal de boucherie, et le porc est mentionné dans de nombreuses sources du Moyen Empire, aux côtés des autres animaux d’élevage.
Le porc est même un animal fondamental en Égypte, car il est une source importante de protéines alimentaires dès l’Ancien Empire, comme l’archéologie l’a montré. Des chercheurs italiens ont ainsi retrouvé des signes de cysticercose sur l’estomac d’une momie. La cysticercose est une maladie parasitaire grave induite par l’ingestion de la larve du Tenia solium, une espèce porcine.

Les Égyptiens avaient établi dans le langage courant, magique, médicale et littéraire une différenciation sexuelle de l’animal en donnant un nom au mâle et à la femelle, preuve de sa proximité avec l’homme. Il est aussi connu sous plusieurs noms adaptés à plusieurs contextes en rapport avec l’environnement humain.
Le porc était utilisé en médecine : les dents (pilées), les yeux, le sang, la graisse, les tripes, sont utilisés par les médecins pour traiter des affections diverses. Il existait aussi de petites amulettes de fritte colorée en forme de porc, considérées comme des porte-bonheur.

L’aspect positif

Il est en rapport avec la truie. Les Égyptiens avaient remarqué que la truie pouvait manger ses petits (forme d’auto-régulation en fonction de la masse de lait à donner) et l’avaient assimilée à Nout avalant le soleil.

Les aspects négatifs

Sa méchanceté et sa goinfrerie légendaire font du porc un animal globalement néfaste, associé à Seth. En effet, Seth se serait transformé en porc noir pour dérober et dévorer la lune, l’oeil gauche d’Horus fils d’Osiris.

Alors Rê dit à Horus :”Permets-moi de voir ton oeil après ce qui lui est arrivé !”

Quand il le vit,il dit : “Regarde donc vers ce trait-là(tandis que) ta main ouverte est sur l’oeil sain qui est là !

“Horus se mit à regarder vers ce trait-là. Horus dit : “Vois, je vois tout blanc.”

C’est ainsi qu’apparut l’oryx blanc. Rê dit alors :”Regarde donc à nouveau vers ce porc noir là !”

Alors Horus se mit à regarder vers ce porc (et) se mit à crier à cause de l’état de son oeil blessé en disant :”Vois, (mon) oeil est comme (il était) à ce premier coup qu’avait porté Seth  contre mon oeil”.

Alors Horus perdit connaissance devant lui.Rê dit alors (aux dieux) :”Mettez-le donc sur son lit jusqu’à ce qu’il ait été guéri”

Alors Seth se transforma en porc contre lui et il causa une blessure dans son oeil. Alors Rê dit : “Que le porc soit détesté par Horus !”

“Ah, s’il pouvait guérir”dirent les dieux.C’est ainsi qu’apparut le tabou du porc en ce qui concerne Horus, du fait des dieux, et ceux qui sont à sa suite,et, quand il était jeune, sa bête de sacrifice était devenue le porc,avant que son oeil ne fût malade.

Texte de sarcophage, formule 157 au musée du Louvre

C’est dans cette assimilation à Seth qu’il faut chercher l’origine du tabou qui pèse sur les porchers : ils sont les seuls à ne pas pouvoir pénétrer dans l’enceinte d’un temple, raconte Hérodote.
Et c’est probablement pour venger Osiris que l’on sacrifie un porc?µet une chèvre, un autre animal séthien – lors des fêtes memphites de Ptah-Sokar-Osiris, le 24 du 4e mois de la saison akhet.

L’impopularité de l’animal a suivi celle du dieu. C’est ainsi qu’à la Basse Époque, le dieu Seth ne véhiculant plus que des valeurs négatives, l’image du porc est devenue très négative elle aussi, tous ses comportements ont été tournés en dérision et en particulier sa fécondité où sa façon de se nourrir.

L’interdiction

Dans son ouvrage, Youri Volokhine, égyptologue et professeur d’histoire des religions à l’Université de Genève, tord le cou à nombre d’idées reçues sur les interdits alimentaires. Tout d’abord, le porc n’était pas interdit de consommation dans l’Égypte ancienne mais surtout interdit de temple, c’est-à-dire qu’il ne faisait pas l’objet de sacrifices offerts aux dieux.

En fait, comme l’énonce l’auteur en conclusion:

« Si l’on cherche un interdit alimentaire véritable en Égypte ancienne, ce n’est pas vers le cochon qu’il faut se tourner, ni même vers les poissons (car ils sont parfois aussi interdits) mais, curieusement, vers un autre membre du cheptel familier : le mouton.

Et c’est probablement un autre livre qu’il faudrait écrire, pour réaliser à quel point, autour des ovins, se met en place un véritable système d’interdits (le plus souvent implicite), qui dans les faits n’existe nullement pour les suidés.
En effet, on ne mange pas de la chair du mouton ; dans les campagnes, on ne l’utilise pas à autre chose qu’au foulage du sol ou du grain ; on se défend de porter sa laine. Ces interdits de précaution (et non pas de détestation) concernant l’animal sont d’ailleurs sûrement à relier au fait que le mâle, le bélier, est particulièrement valorisé par le système religieux .
Sous forme de « dieux béliers » (Khnoum, Banebded, Amon, Hérychef, etc.), associés à un cheptel sacré ou à des animaux intronisés représentant le dieu.

Le porc dans le judaïsme

Les tas d’ossements exhumés lors des fouilles des hameaux israélites dans la région du Jourdain diffèrent radicalement des ossements découvert ailleurs, sur un point très particulier: les os de porc n’y figurent pas.
Les tas d’ossement des habitats antérieurs contenaient des os de porc ainsi que ceux des habitats postérieurs à l’âge du Fer.
Mais pendant toute la durée de l’âge du Fer (IIIe millénaire avant JC) qui correspond à l’époque des monarchies israélites dans les hautes terres, le porc n’était ni cuit, ni consommé, ni élevé.
En comparaison, les données en provenance des sites d’habitat du littoral philistin à la même époque celle du Fer I, révèlent une présence importante d’os de porc parmi les ossements collectés.

Tandis que les premiers israélites ne mangeait pas de porc, les Philistins, en revanche, en consommaient, il en était de même des Ammonites et des Moabites établis à l’est du Jourdain, si l’on en croit les données rudimentaires dont nous disposons.
L’absence de consommation de porc ne s’explique pas seulement par des raisons environnementales ou économiques. Elle reste en fait le seul indice que nous possédions d’une identité précise, partagée par l’ensemble des villageois établis dans les hautes terres à l’ouest du Jourdain.
Peut être les proto-israélites ont ils cessé de manger du porc uniquement parce que les peuplades qui les environnaient, leurs adversaires en consommaient, et qu’ils commençaient à se vouloir différents d’eux?

Des pratiques culinaires ou des coutumes diététiques spécifiques sont deux des moyens qui permettent de dresser des frontières ethniques. Le monothéisme, ainsi que les traditions sur l’Exode et sur l’alliance n’ont fait leur apparition, semble t’il, que bien plus tard. Donc un demi-millénaire avant la composition des textes bibliques qui présentent les détails des règlements diététiques, les Israélites avaient décidé pour des raisons qui demeurent obscure de ne plus manger de porc.
Lorsque les juifs contemporain observent cette interdiction, ils ne font que perpétuer la plus ancienne pratique culturelle du peuple d’Israël attesté par l’archéologie.

Dans les écrits religieux

Dans le Livre du Lévitique (11,7), reconnu à la fois par les Juifs dans la Torah et par les Chrétiens dans l’Ancien Testament de la Bible :

« Vous ne mangerez pas le porc, qui a la corne fendue et le pied fourchu, mais qui ne rumine pas : vous le regarderez comme impur. »

Le Coran reprend ce principe (sourate 5,3) :

« Sont interdits pour vous les animaux qui meurent d’eux-mêmes, le sang, la viande de porc et les animaux dédiés à d’autres qu’Allah… »

Les Juifs et les Musulmans rejettent l’insalubrité, la toxicité et tout genre d’impureté. Le cochon entre dans cette dernière catégorie car il est traditionnellement associé à un caractère obscène et peut mettre en péril la santé de l’homme. La chair de cet animal présenterait un danger à cause de sa forte concentration de graisse. Cette viande peut contenir des trichines, des vers parasites de l’intestin du porc. Chez l’homme, leur présence peut évoluer en trichinose et se révéler mortelle.

Chaleur et impureté

Le climat des pays chauds comme le Proche Orient ou le Maghreb sont un facteur supplémentaire pour considérer cet animal impur. En effet, les porcs se roulent dans la boue et la chaleur ambiante peut aggraver les risques de bactéries et de microbes développés sur et dans leurs corps. La chaleur apporte aussi le problème de la conversation de cette chair qui se détériore rapidement. Si l’on se replace plusieurs siècles en arrière, à l’époque où la Torah et le Coran ont été écrits, on comprend les risques liés au porc et la logique de son interdiction.

Une viande devenue saine

L’interdiction du porc est ancrée dans ces deux cultures religieuses mais en cas de famine ou si l’individu n’a pas connaissance qu’il en mange il n’est pas considéré comme infidèle à sa religion. Rappelons aussi que les risques sanitaires liés au porc sont devenus négligeables à l’ère moderne, pour peu que les bonnes conditions d’élevage, de conservation et de préparation soient appliquées. Donc, si vous n’avez pas d’interdit religieux, n’hésitez pas à vous régaler avec un bon plateau de charcuteries ou un bon de jambon de Noël créole!!!

Sources:
-Osirisnet
-Le porc dans l’Égypte ancienne de Youri Volokhine
-La bible dévoilée de Israel Finkelstein et Neil Asher Silberman


Vous aimerez aussi

nil

L’Egypte

abou simbel

La civilisation égyptienne, une civilisation nègre

langue africaine

La diffusion des langues africaines, source de contradiction

arbre de vie

L’arbre de vie

noun

Nanni nannan

i^puwer

Les dix plaies d’Egypte : décryptage


Laissez un commentaire



Mon Instagram

Un ancêtre est un défunt qui a eu les rites funéraires nécessaires pour accéder à l`ancestralité. Il est comme une étoile autonome qui va agir en retour pour le bien et la prospérité de sa descendance. Mais si ses yich ka foutè fè, rien ne l`oblige à agir. Surtout si sa descendance ne le capte même plus.

De ce fait, il va boire son petit thé d`atoumo et manger ses pop-corn en regardant la télénovela de notre vie. Tôt ou tard, an piti ké vini rélé`y...donc il patiente.

N`oubliez pas un ancêtre est autonome, i pa bizwen`w ankò pou fè zafè`y. Mais par compassion suite à la rupture de la transmission familiale pendant de nombreux siècles, i toujou ka fè dé twa bagay an soumsoum pou ba`w fòs-la. Dèlè zot ka di sé bondié...zansèt ka toufé mé yo ka fè`y.

Mais attention lorsque la conjecture est favorable pour la reconnaissance qu`ils méritent et qu`ils ne l`ont pas pour x raisons, alors là lè zot ké pliché yo pé ké vini rilévè`w ankò.

Rélé bondié pou wè. 

#fokousav
...

199 5

Je suis heureuse de vous annoncer la sortie prochaine (01 octobre) de mon deuxième roman Sen déyè Djab aux éditions @jets_dencre 🥳.

Dans un délire humoristique, philosophique, sarcastique et initiatique j`ai voulu retranscrire la bible Martiniquaise.

Et oui la bible en soumsoum qui se conte sans jamais se révéler au grand jour à travers les évangiles de Soraya et de Man Joliba. En effet, la femme a toute sa place dans notre histoire rocambolesque.

Disponible en librairie.

#livres #littérature #caraïbe #livrespeyi #booklover
#book #litteraturecaribeenne
...

418 25