Lasirèn

Lasirèn


Dès les premiers mois de son mariage avec Kristelle, Romuald se réfugia dans la pêche. Lui, qui n’aimait ni la mer ni les loisirs statiques, s’était découvert une nouvelle passion. Le soir, au lieu de rentrer chez lui pour s’occuper de son foyer ou faire jouir sa femme, il passait des heures près de l’eau tout en sirotant sa bière d’atoumo.

Il n’était pas un grand pécheur qui pouvait ramener de nombreux poissons, non. Il était simplement un amateur de loisir en plein air qui recherchait surtout la paix et la mélodie apaisante de l’eau qui léchait le sable à ses pieds, loin des babillages de Kristelle ou des pleurs de leur fils Krisuald.

Jusqu’à maintenant, il regrettait d’avoir cédé à cet effet de mode qui consistait à composer le prénom de l’enfant avec celui des parents.

-Kris ki sa ? Avait hurlé sa mère, la main sur le cœur en tenant fermement sa médaille de baptême lorsqu’il lui avait annoncé le prénom de son petit-fils. Mon fils, la déraison est tombée sur toi ! Il n’y a pas de saint pour ce genre de prénom !

Qu’importe, Kristelle décidait de tout, même de quand elle devait lui sauter dessus ou le sucer. Manzel avait de drôles de manières. Avec elle, le consentement ne fonctionnait que dans un sens parce que d’après une de ses amies érudites du langage soit disant, le con, c’était le sexe de la femme et c’est lui qui choisissait où et quand il voulait qu’on le laboure. Si une nouvelle société matriarcale devait voir le jour, assurément, Kristelle en serait la fondatrice.

Romuald, qui voulait être un père, était relégué au rôle de géniteur par sa propre femme. Elle décidait de tout, comme toujours. Ne pouvant plus la supporter ou par lâcheté, il préférait se réfugier sur les
plages ou les jetées avec sa canne à pêche. Selon son application, ce soir-là serait une pêche fructueuse grâce aux effets de la lune. Elle était remplie.

Romuald s’installa à son petit spot secret dans la commune du Prêcheur. Bien calé sur son transat, il roula son premier spliff tout en écoutant Tombolo le nouveau son de Kalash. Il prépara ses appâts et lança au plus loin sa ligne. Puis il patienta en scrutant les constellations.

Romuald était serein, il ne craignait pas les esprits qui rôdaient dans les parages grâce à son ben feyaj de naissance.

-Non seulement je t’ai bien badigeonné avec les feuilles, mais en plus j’ai enterré ton cordon ombilical sous un roseau des Indes. Tjip sé pa an piti proteksion ki la han ! Lui avait martelé sa mère.

De ce fait, il pouvait profiter des effets de sa weed bio issus de son jardin sans se soucier du vacarme des démons de nuits. Deux heures s’écoulèrent et les nuages semblaient vouloir causer à Man Lalin. Romuald sentit que quelque chose tirait son hameçon. La pêche miraculeuse pouvait alors débuter.

Seigneur! Au lieu de tirer une première prise comestible, il pêcha une magnifique sirène. Ses cocos yeux rougis s’extirpèrent de son visage tant il n’y croyait pas. C’était une belle créature dotée d’une peau bleu nuit qui scintillait sous les reflets de la lune. Ses yeux profonds reflétaient la poussière d’or et d’ étoiles. Sa bouche invitait à braver les interdits du cosmos. Quant à la pointe de ses tétés… “ciel, lanmè, ayez pitié de l’âme de Romuald!”

Sans aucune parole, l’être au corps de femme et à la queue de poisson recouverte d’écailles violets embrassa passionnément Romuald malgré l’hameçon qui transperçait une de ses joues. Sans plus attendre, Romuald goba la poitrine de la sirène à la peau sucrée. Ses tétés aussi pleins que des
noix de coco lâchèrent un délicieux fluide au goût de cacao.

Romuald accueillit ce dessert aphrodisiaque, s’en aspergea le visage tout en léchant les dernières gouttes qui dégoulinaient de ses longs doigts. Les écailles au contact de sa peau semblaient être aussi légères et douces que des plumes d’oie. Plus la sirène frottait sa queue contre lui, plus son corps réclamait ce contact bandant.

La friction était aussi délicieuse que l’étau d’une madafa. Ses couilles semblaient vouloir éclater entre les
mains expertes de la sirène qui caressait et palpait ses bijoux. Romuald semblait vivre un rêve éveillé. La créature ne le ménageait pas, mais tout ce qui coulait d’elle était un mélange de saveurs irrésistiblement gourmandes.

Ses baisers avaient le goût du planteur, sa nuque transpirait la pina colada, et ce chocolat qui s’écoulait de ses mamelles diaboliques le faisait téter comme un nourrisson insatiable. Alors qu’il avait envie de la remplir, la mer se fendit en deux afin qu’il puisse goûter sa prise d’anthologie sur le sable froid des fonds marins.

À l’endroit où la femme possédait une fleur envoûtante, la bête magique elle avait une fente d’où s’échappait une lumière aussi flamboyante que celle des enfers. Romuald y glissa la main. Surpris par la sensation chaude et humide de cette cavité étroite et capitonnée, y plongea son kal et senti son âme hurler de plaisir alors qu’il succombait à une petite mort tortionnaire, peignant de lait crémeux le visage crépusculaire de sa sirène. Une première faciale donc.

Au petit matin, il se réveilla sur le rivage complétement vidé. Sa nuit envoûtante entre les eaux lui permit de jouir 10 fois de suite sous les courbes et autres orifices cachés de la sirène. Dès les premiers rayons du soleil, elle l’avait ramené au rivage en l’embrassant tendrement une dernière fois. Cette nuit magique fut gravée à jamais dans toutes les particules qui composaient Romuald.

Le traitement à base de « manman » que lui avait administré sa femme lorsqu’il regagna son domicile ne l’avait pas bougé. Et depuis cette nuit-là, il se rendit tous les soirs sur son spot en espérant retrouver la sirène. Un, trois, six mois passèrent sans que la détermination de Romuald ne faiblisse.

Au bout d’un an d’attente, il utilisa ses économies pour acheter un petit bateau dans les mains de son cousin. Il espérait sillonner la mer à la recherche de l’ensorceleuse. S’il avait pu, il aurait marchandé avec les esprits marins pour la revoir une dernière fois. D’ailleurs, son cousin et confident Rosélien, lui avait conseillé d’abandonner ses recherches.

Tôt ou tard, on retrouverait son corps échoué sur une plage, rongé par les crabes. Qu’importe, Romuald devait la retrouver. L’année écoulée ne vint pas à bout de son amour pour cette femme poisson. La chance lui fit risette lorsqu’un jour Rosélien lui conseilla de graver un symbole particulier sur le bateau.

Selon les dires d’un vieux pêcheur de Bellefontaine qui se soûlait à l’absinthe, le vévé avait le pouvoir d’appeler la sirène. Apparemment, elle avait pour habitude de prendre comme amants les pêcheurs et de les koké dans le canot sous les regards ébahis des soukougnan.

La jalousie titilla Romuald à l’écoute de cette légende, mais il ne laissa rien paraître devant son cousin. La sirène devait et rester sienne. Aucune main devait palper ses écailles, aucune langue ne devait lécher son chocolat lanmou.

Armé d’un grand couteau, Romuald traça le vévé sur la coque de son bateau. C’est après avoir sillonné la mer en long et en large que le vévé commença à scintiller en diffusant une petite lumière violette. Des larmes de bonheur commencèrent à jaillir, le pêcheur était un homme heureux. Oui enfin, il allait la retrouver. Subitement, un calme troublant s’installa à la surface des eaux, c’était là le signe que sa bien-aimée venait.

Bondié! Au lieu de découvrir l’incarnation de la beauté, Romuald découvrit l’incarnation de la damnation. Une espèce de créature aux ongles coupants et aux doigts crochus fit son apparition. Sa peau semblait en décomposition, ses seins tombaient comme des serpents en quête de proie à terrifier. D’une voix rocailleuse venue d’outre tombe, la créature interpella Romuald :

-Tu m’as convoqué mon amour, me voici donc devant toi sans artifices.

Le vieux pêcheur de la commune de Bellefontaine, grand adorateur de l’absinthe avait raconté à Rosélien une vieille légende des mers. Selon les marins, celui qui gravait ce symbole sur la coque de son bateau acceptait son union avec la sirène. C’est en buvant son délicieux nectar de cacao que l’âme du marin s’unissait avec elle. Mais pour sceller cette union, il fallait dessiner le vévé.

Se sachant repoussantes, les sirènes pouvaient se métamorphoser en de belles créatures séduisantes une fois tous les cinq ans grâce à un lambi sacré de Manman Dlo. Voulant koké Kristelle, la femme de Romuald au grand jour, il cacha certains détails à son cousin. C’est ainsi que ce cher Romuald à l’aube de sa trente cinquième année fut happé dans les profondeurs de la mer par une vilaine courtisane des eaux.

Lors de certaines parties de dominos endiablées sur les plages, de nombreux pêcheurs racontaient que certaines nuits de pleine lune, il pouvaient entendre les gémissements de Romuald. Une minorité affirmait que c’était de plaisir, la majorité, des complaintes.

Qu’importe, supplice ou délice, pendant ce temps Rosélien s’évertuait à honorer quotidiennement le
con sacré et le bonda de Kristelle. Toujours, selon les exigences de madame.

Texte co-écrit par Valérie RODNEY aka lafleurcurieuse et yummymq

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Illustration de @Fifanngreen


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Un commentaire pour “Lasirèn”

  1. Excellent récit, fort excitant de surcroit! Rapide et facile à lire. J’aime le mélange vaudou et sexe. Merci pour cette douceur

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