Les jumeaux : fait insolite en Haïti
Je vous invite chaleureusement à plonger dans le récit de Raphlee qui illustre parfaitement le pouvoir des jumeaux dans le vaudou haïtien. Et afin de mieux apprécier le récit, je vous invite à lire Marassa, le pouvoir des jumeaux dans le vaudou haïtien.
Que la cérémonie commence, tout le monde était fin prêt. Le prête vodou (Ougan), ses subalternes (wonsis , initiés, et autres…) se mettaient en position. Après le signal du chef, les musiciens se entrèrent dans la partie. Les tambours résonnaient, au loin, entraînants, attrayants, invitant le voisinage à la danse.
L’invitation fut brève, et comme toute cérémonie, on commençait par la prière. Alors que la cérémonie prenait chair par la prière. Au loin au sommet d’une crête , perchés sur les branches fleuries d’un pyé mango deux petits garçons estomaqués, trahis, déçus, semblant avoir pris un coup dans leurs égo, regardaient la scène avec intérêt.
” Que la cérémonie commence !”, Les yeux durs, le cœur de pierre, ils eurent un rire noir.
2h avant la cérémonie :
“Manman, vous allez faire quoi? “Janette extenuée, son petit garçon de 8 ans, pas plus haut qu’un gouyad de chien qui ne cessait de lui poser cette question depuis ce matin. Elle en avait mare, à chaque pas elle le trouvait entre ses pattes à lui poser encore et encore cette question.
Julien était son cadet, et dire qu’il aurait pû être deux a lui poser la même question. C’était une portée de jumeaux mais son frère a eu moins de chance. Il est mort dans de tragiques circonstances, noyé dans son bain de bébé. Paix a son âme ! Mais tout le monde savait que c’était le dyab du lakou qui l’avait mangé. Et oui, il faut surveiller les jumeaux car leurs forces est double.
N’entendant toujours pas de réponse de sa mère, le petit s’en alla. ” Vous l’auriez cherché” furent ses derniers mots. Sa mère navrée la regarda partir mais se remit aussitôt au travail. En effet, elle avait beaucoup a faire avant que tout soit prêt pour la cérémonie.
“Jimo, Jimo ,Jimo” c’était la petite voix perchée plein de colère de Julien, fendant les ragé qui appelait son meilleur ami. Tout comme lui, il était d’une portée de jumeaux, et, son parey une fille, est morte dans de tragique circonstances.
Lorsqu’ ils étaient bébés, leur mère les avaient laissé endormi dans leurs lits. A son retour, elle avait retrouvée sa petite fille la tête fendue sur le lit, sans être ni tombé ni frappée. Les fourmis l’entouraient déjà, tandis que le petit garçon dormait paisiblement.
Pour être invraisemblable ça l’était !
Jimo, lui aussi un petit garçon de huit ans , courait déjà à la rencontre de son ami. Cheveux au vent ( il les portait long, s’il les coupait il mourait c’était la condition sine qua non de sa vie) pieds nus , foulant la terre rouge, stoppa net en voyant l’expression de son ami.
“Qu’es ce que tu fais, que se passe-t-il “
Ils nous ont manqué de respect, répondit-il d’une voix dure. Pour un enfant il avait déjà de la trempe, faut dire il avait pas mal besogné. Un petit garçon qui avait déjà vécu ce que la plupart des adultes n’ont pas encore vécu.
“Nous allons devoir remédier a cela , et tout de suite, rien ne se fera sans notre permission”.
Les enfants s’en fuirent vers les montagnes. Et là unissant leurs pouvoirs, ils bloquèrent toutes interpellations que ce soit les lwa, les ginens, les esprits, les dieux ou déesses…”Ça va barder”!
Dans le lakou au loin , l’agitation était a son comble. Face au silence des différentes interpellations le ougan fut perplexe. Tous les yeux étaient fixés sur lui, et ,attendaient.
Il avait chaud , il avait froid, il était vexé , énervé , il fulminait intérieurement.
De grosses gouttes de sueurs coulaient de son front à son grand cou sale de dragon. Il interpellait , interpellait encore et encore… Lwa, ginen, maitre , maîtresse… Nada , none, niet rien…. La réponse n’était que silence.
Une heure passa , deux heures, trois heures… Deux autres heures et les gens s’impatientaient.
“Sa’k pase men’m papa? Epa anyen pa reponn?”
Janette n’en pouvais plus, la demande devrait être déjà présentée. Le ougan essaya de la calmer. Rien n’y fit. Tous, commençèrent a montré des signes d’impatience. Certains s’en allèrent empochant une petite bouteille de clairin. D’autres s’enfuirent vers la cuisine, où il dévorèrent avec entrain les morceaux de griots (le griot haïtien est une recette de viande de porc mariné) accompagné de yanm, tayo et bannan.
“Sûrement gen yon jimo nan lakou a, e io pa mande’l pemisyon” dit une voix caustique, dont le propriétaire ne pensait qu’à remplir sa panse.
La phrase fit son chemin et arriva tant bien que mal aux oreilles de Janette dans un murmure lumineux. Elle s’arrêta net, ivre de colère, un nom, un seul lui monta a la tête Julien.
“Kote fout ti gason yo bay pou Jilyen an“, tonna-t-elle.
La minute suivante fût dédié à la recherche de Julien. Mais on ne le trouva nulle part. En haut de la montagne, ils se tenaient les côtes, fou de rire.
“Ton frère Marie, il est où ?” Demanda Janette à la grande sœur de Jimo.
– Il est parti, depuis ce matin! Répondit cette dernière.
– Ces vermines ! Hurla Janette, ils sont ensemble et sont la cause de tout ça ! Venez donc les enfants!
– Des enfants ! hurla le Ougan, des enfants ! Demander la permission a des pequenos , jamais !
– Il le faudrait bien, répondirent les enfants en cœur.
Étonnés, tous les yeux convergèrent vers eux. Le ougan eu un choc en regardant ces deux petits garnements. Il recula instinctivement , le froid dans le dos , voyant l’expression de leurs visages.
–Nous avons fait une grave erreur ne vous demandant pas la permission, murmura Janette, pardonnez-nous , et laissez donc la cérémonie prendre, il est temps que tout commence.
–Bien, répondirent les enfants, mais c’est pas a toi de nous demander la permission maintenant, mais à lui. Ils se retournèrent déterminés vers le ougan.
Ce dernier se sentit vexé, il était granmoun et jamais il n’allait s’abaisser a demander la permission a quiconque, et surtout pas à des enfants.
– Tu vas leur demander la permission, déclara Janette, sinon tu n’auras pas une péniche !
– Soit, répondit-il, que me vaut de l’argent contre ma fierté et mon respect.
Il s’en alla dans un coin sans se retourner, Janette regarda les enfants désolée, il était déjà 4h et rien ne se passa encore. Mais cela n’inquiéta en outre les enfants.
Appelant un autre granmoun, les enfants lui donnèrent la permission déjouant ainsi leurs barrières et tout purent enfin se dérouler.
– Vous ne rester pas les enfants? demanda Janette les voyants partir.
– Non, répondirent-ils en cœur, il est temps que nous allions jouer.
D’un accord tacite , ils s’en furent vers le coin où le Ougan se trouvait.
“Alors comme ça, on a trop de fierté ?“
Le ougan apeuré regarda ces deux petits diables, non pas qu’il ne pouvait rien contre eux, mais il avait enfreint la loi et ne savait pas l’ampleur de leurs pouvoirs.
“Tu aurais dû nous demander la permission et perdre un peu de ton égo. La prochaine fois que tu iras dans un lakou demande d’abord la permission au maître lakou qu’il soit plus petit ou plus grand, isit la se nou ki mèt e nou granmoun anyen pa fet san pemisyon nu”
Les yeux brillants, les mains jointes, ils récitèrent une petite prière. Tel une couleuvre, le ougan grimpa si l’on peut dire : les pieds en premier dans un petit cocotier de 1 mètre. Deux jours plus tard , il était encore sur ce petit arbre ne pouvant plus descendre, tandis que les pans de son pantalon pendouillaient au sol.
“Gen granmoun nan lakou a“.
De Raphlee
“C’est une histoire vraie qui s’est passée a Pilate ma province natale. Et ces gens sont de ma famille ! “
Super👏